L'auteur est historienne, spécialiste de la genèse de l'écologie dans la France d'après-guerre. Elle revient ici sur quelques faits marquants des années 60. En 1962, est publié "Silent Spring" par Rachel Carson, biologiste américaine, qui met au grand jour l'empoisonnement des chaînes alimentaires et des écosystèmes par les dérivés d'armes chimiques développés pour la Seconde Guerre mondiale, et promeut les méthodes de lutte biologique. En 1963, les instances étatiques françaises réaffirment la fiabilité du système d'homologation des pesticides de l'époque. Dans le même temps, les lois agricoles planifient la modernisation des exploitations familiales "rentables" et le délestage de celles jugées "archaïques". L'article développe l'enchaînement des actions et déclarations qui ont traversé les années soixante et transformé la production céréalière, puis l'élevage, avec les industries agro-alimentaires en moteur du processus d'industrialisation de l'agriculture. La société de consommation qui se développe marginalise et déclasse des paysans devenus non-compétitifs, et qui tenteront de résister. Certains d'entre eux deviendront les premiers praticiens de l'agriculture biologique. Les premières structures de promotion de la bio s'emploient à connecter cette petite paysannerie avec les préoccupations de médecins, hygiénistes, agronomes et naturalistes sensibilisés.