- Titre :
- BIOACTUALITES, N° 2/20 - Mars 2020 - Bulletin N° 2/20
- Type de document :
- Bulletin : Périodique
- Paru le :
- 01/03/2020
- Année de publication :
- 2020
- Langues:
- Français
- Commande possible de photocopies :
- -
- Appartenance :
- ABioDoc
Dépouillements


Contribuer à protéger le climat ; Ensemble contre le réchauffement ; Savoir pour pouvoir
Claudia FRICK, Auteur ;
René SCHULTE, Auteur
Ce dossier regroupe trois articles qui traitent du lien entre agriculture et changement climatique en Suisse. Le premier article explique pourquoi il est nécessaire que lagriculture réduise ses émissions de gaz à effet de serre (GES) et quel rôle peut jouer lagriculture biologique dans cette réduction. Il décrit également comment la politique agricole peut aider à impulser des changements et comment les consommateurs peuvent eux aussi contribuer à cet effort. Le deuxième article dépeint plusieurs exemples de mesures mises en place par des membres de lassociation AgroCO2ncept pour réduire leurs émissions de GES (AgroCO2ncept est une association suisse qui regroupe 24 fermes qui ont pour objectif de diminuer de 20 % leurs émissions de dioxyde de carbone, de méthane et de protoxyde dazote) : favoriser lhumification en limitant le travail du sol (mulch, semis direct
), fertiliser les parcelles à laide dengrais verts, réduire les émissions de méthane des bovins en leur donnant du charbon végétal
Enfin, le dernier article porte sur les formations professionnelles agricoles suisses. Actuellement, le changement climatique nest pas inscrit au programme, il est toutefois abordé par des enseignants volontaires qui intègrent cette thématique dans leurs cours (comprendre les impacts du changement climatique, étudier des leviers pour diminuer les émissions de GES au sein de sa ferme
). Cependant, ceci pourrait bientôt changer : le plan de formation va être révisé et va probablement inclure cette notion.


Le compost fixe beaucoup de carbone
Chantal HERZOG, Auteur
En Suisse, Agroscope et le FiBL ont mené un essai en 2017 afin de regarder si le compost et le digestat augmentent les teneurs en carbone dans les sols agricoles et sils favorisent la formation dhumus. Pour cela, des échantillons de terre ont été prélevés dans 59 fermes suisses, dont 41 en conventionnel et 18 en bio. Ces exploitations ont été réparties dans trois groupes : un où les agriculteurs avaient épandu au moins deux fois du compost ces dix dernières années, un autre où du digestat avait été utilisé pour compléter la fumure usuelle (fumier ou engrais minéral), et un groupe témoin dont les parcelles nont pas été amendées. Même si les résultats montrent dimportants écarts au sein de ces groupes, leur analyse a révélé que les parcelles ayant reçu du compost contiennent en moyenne 37 % de carbone en plus que les deux autres modalités (digestat et témoin). Cette augmentation a été constatée aussi bien en bio quen conventionnel. Lanalyse de la biomasse microbienne a également révélé que la biomasse des parcelles ayant reçu du compost est supérieure de 47 % par rapport aux parcelles qui ont reçu du digestat. La comparaison de toutes les parcelles bio et conventionnelles a également montré que cette biomasse est supérieure en moyenne de 25 % dans les parcelles bio.


Des pommes de terre pour les cochons
Michael GOTZ, Auteur
En élevage porcin, les pommes de terre sont un très bon aliment : rassasiant et pas cher (notamment les pommes de terre qui ne peuvent pas être vendues en raison de leur calibre trop petit, de leur couleur verte ou parce quelles sont abîmées...). Elles doivent, en revanche, obligatoirement être étuvées avant dêtre distribuées aux cochons afin déliminer la solanine quelles contiennent (elles ne peuvent pas être données crues). Ce type daffouragement est devenu rare et plutôt réservé aux élevages à petit effectif. Dans cet article, deux éleveurs bio basés en Suisse, qui incluent encore des pommes de terre dans leurs rations, expliquent comment ils procèdent. Matthias Vögele conduit une ferme de 48 ha (dont 3,5 ha de pommes de terre) et élève 30 truies mères, ainsi que 40 vaches Angus. Chaque année, il obtient six à huit tonnes de tubercules invendables quil donne à manger à ses truies de fin septembre à mi-décembre (environ 4 kg/j/truie). Cet aliment remplace les bouchons de maïs et lui permet de réaliser des économies. Il a acheté une étuveuse de 160 L doccasion pour les cuire et les distribue à la main à laide dune pelle et dune brouette. Il estime le temps de travail supplémentaire à 20 minutes par jour. Autre témoignage, celui d'Andreas Bracher qui élève 40 truies. Il sest tourné vers cet aliment pour réaliser des économies : il estime économiser 18 francs suisses par jour (soit environ 16,62 ) comparé à lachat de concentrés bio.


Pommes : Marssonina, une nouvelle plaie qui reste un véritable défi permanent
Markus SPUHLER, Auteur
Marssonina coronaria cause de nombreux soucis aux producteurs de pommes bio depuis 2010. Au printemps, ce champignon sattaque aux feuilles, ces dernières finissant par jaunir et tomber. Face aux nombreux dégâts constatés en Europe, un projet de recherche-développement européen a plus amplement étudié la biologie de ce pathogène, ainsi que des moyens de lutte pour sen prémunir. Cette étude a révélé quelques points positifs : ce champignon effectue uniquement de la multiplication végétative en Europe (pas de multiplication sexuelle), ce qui signifie quil sera lent à sadapter à de nouvelles conditions. Autre bonne nouvelle : sa diversité génétique est assez faible. En revanche, lutter contre Marssonina coronaria semble plus difficile que prévu. Certaines recommandations, comme ramasser les feuilles mortes à lautomne ou les mulcher, nauraient aucun effet sur ce ravageur. De plus, les premières infections seffectueraient dès le mois de mai et non en juin (elles resteraient silencieuses dans un premier temps). Le traitement le plus efficace en bio reste largile qui peut être combinée à du soufre mouillable. Comme les chercheurs nont pas trouvé de phases sensibles auxquelles traiter, ils recommandent détaler les traitements sur tout lété. De plus, létude de la sensibilité des variétés de pommiers a démontré que de nombreuses variétés étaient sensibles à Marssonina coronaria. Aucune variété ne semble vraiment résistante ; toutefois certaines font preuve de robustesse (Galant, Ladina, Discovera).


Réduire la tourbe dans la pratique
Kathrin HUBER, Auteur
Dès 1987, la Suisse a arrêté dextraire de la tourbe en raison des dégâts environnementaux que cela provoque. En 2012, elle a également promulgué un plan dabandon de ce substrat dans le but de diminuer ses importations de tourbe. Depuis, lutilisation de tourbe a fortement diminué dans les pépinières, les jardins privés et chez les paysagistes. Toutefois, il est plus compliqué de sen passer en maraîchage (pour la production de plants) et en horticulture (production de plantes ornementales). De 2017 à 2019, dix entreprises horticoles (conventionnelles et biologiques) ont participé à un programme de recherche afin de limiter leur utilisation de tourbe : elles ont, pour cela, utilisé des substrats contenant moins de 40 % de tourbe ou des substrats ne contenant pas du tout de tourbe. Durant la troisième année de lessai, toutes ces entreprises ont obtenu des qualités de production bonnes à très bonnes avec ces « nouveaux » substrats, même pour des cultures difficiles. Avec lexpérience, elles ont réussi à respecter des durées de culture habituelles, alors que cest souvent plus difficile et plus coûteux avec des substrats contenant moins de tourbe. A la suite de ce projet, toutes ces entreprises ont continué à diminuer leur utilisation de tourbe et trois dentre elles ont même arrêté den utiliser.


Quand le ver est dans la farine
Ursina STEINER, Auteur
Les teignes, mites et autres pyrales sont le cauchemar de tous ceux qui travaillent avec, ou conservent, des denrées alimentaires. En bio, il est important deffectuer de la prévention pour éviter leur apparition et dutiliser des traitements curatifs. Dans cet article, deux experts suisses, Bettina Landau (biologiste qui travaille dans une entreprise de désinfection) et Uli Lachmuth (biologiste expert des mites alimentaires), expliquent le cycle de développement de ces ravageurs et apportent des conseils pour mieux les gérer. Le plus important reste la prévention : bien nettoyer les surfaces et les recoins. Il est aussi recommandé deffectuer une séparation spatiale entre les anciennes et les nouvelles marchandises pour minimiser les contaminations. Concernant la détection et les traitements contre les mites alimentaires, les pièges à phéromones sont à utiliser uniquement dans des bâtiments fermés car les mites mâles peuvent parcourir plusieurs kilomètres pour atteindre des phéromones femelles. Il est également possible de réaliser de la confusion sexuelle en conditions fermées, mais ce produit est assez cher. Autre détail important : la température. Les mites se multiplient très vite entre 25 et 30 °C alors que leur cycle de développement dure deux fois plus longtemps à 18 °C et quelles sont inertes en dessous de 12 °C. Des auxiliaires (ichneumons ou du genre Habrobracon) peuvent également être utilisés, mais leur utilisation présente quelques inconvénients.