- Titre :
- BIOACTUALITÉS, N° 9/21 - Novembre 2021 - Bulletin N° 9/21
- Type de document :
- Bulletin : Périodique
- Paru le :
- 01/11/2021
- Année de publication :
- 2021
- Langues:
- Français
- Commande possible de photocopies :
- -
- Appartenance :
- ABioDoc
Dépouillements
Produire biologiquement, aussi pour le climat
Aline LÜSCHER, Auteur ;
Stéphanie FUCHS, Auteur ;
Claire MULLER, Auteur ;
ET AL., Auteur
Ce dossier est consacré aux enjeux liés au changement climatique et aux moyens permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) du secteur agricole suisse, et plus particulièrement aux objectifs que se sont fixés les agriculteurs biologiques. Le premier article effectue un état des lieux rapide des causes et des conséquences du changement climatique en Suisse. Dans ce pays, la température augmente deux fois plus vite que la moyenne mondiale : la fonte des glaces et de la neige libère beaucoup de chaleur et l’océan est trop loin pour avoir un effet tampon. De plus, les aléas climatiques, notamment la grêle et le gel, sont de plus en plus fréquents et intenses. En 2021, ces intempéries ont causé des dégâts évalués à 110 millions de francs suisses selon une estimation de Suisse Grêle. Des agriculteurs témoignent des difficultés climatiques rencontrées en 2021. Afin de ne pas accentuer ces phénomènes, la Suisse s’est engagée, dans le cadre des accords climatiques de Paris, à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Les agriculteurs de Bio Suisse veulent aller encore plus loin en atteignant une « Agriculture biologique climatiquement neutre en 2040 ». Ce sont les bovins qui émettent la majorité des GES attribués à l’agriculture suisse. Le levier le plus efficace, qui est également exigeant, réside dans la diminution du cheptel par unité de surface. La consommation de viande doit également diminuer, tout comme le gaspillage alimentaire.
La vache sans cornes : Débat brûlant autour de ce symbole des bovins
Aline LÜSCHER, Auteur
En Suisse, plus de 80 % des vaches n’ont pas de cornes. L’absence de cornes présente plusieurs avantages : moins d’accidents et de blessures au sein des troupeaux, plus de sécurité pour l’éleveur, les vaches prennent également moins de place dans les bâtiments d’élevage… Néanmoins, 40 % des veaux présentent des signes chroniques de souffrance, trois mois après leur écornage. L’arrêt de cette pratique en bio a suscité de nombreux débats, et il aurait plusieurs conséquences négatives (ex : certains bâtiments ne sont pas adaptés à des bovins avec des cornes) et l’alternative à l’écornage, le gène sans cornes, n’est pas encore assez développée. Les taureaux sans cornes sont, en effet, encore rares et il ne faudrait pas que l’intérêt pour ces quelques reproducteurs augmente la consanguinité au sein des troupeaux. En biodynamie, les cornes sont obligatoires : l’écornage est interdit, tout comme le recours au gène sans cornes. Les cornes jouent, en effet, un rôle important pour l’animal. Ton Baars, de l’université d’Utrecht, a notamment étudié leur rôle sur la régulation corporelle des bovins : les cornes permettent de refroidir le cerveau et contribuent à la thermorégulation de tout le corps (rôle important dans un contexte de changement climatique).
A Ô Faya Farm, la valaisanne Ilona Thétaz met de la liberté en bouteilles
Claire MULLER, Auteur
Ilona Thétaz a grandi en Suisse, dans une ferme conduite en biodynamie. Elle ne se destinait pas à devenir agricultrice et a très vite intégré une école de cirque. Cependant, après un accident, elle a décidé de changer de voie et s’est prise de passion pour le vin. Elle a obtenu un diplôme en viticulture, puis a travaillé dans plusieurs institutions avant d’exercer le métier d’œnologue durant trois ans. Parallèlement, elle nourrissait l’envie de s’installer et a acquis, petit à petit, du terrain et une maison d’habitation dans une vallée verdoyante. La crise sanitaire et le confinement lui ont permis de faire aboutir son projet. Elle est maintenant installée à son compte sur une ferme diversifiée qui regroupe une dizaine d’hectares, dont 4 ha d’abricotiers, 3,5 ha de vignes et le reste en pâturage pour ses moutons. Elle a obtenu la certification bio en 2021. Ses vins se rapprochent des vins natures : ils sont non filtrés et se caractérisent par une utilisation raisonnée du soufre. Comme de nombreux autres producteurs, Ilona Thétaz a dû faire face au gel durant le printemps 2021 : ses abricotiers ont subi de plein fouet ce gel et la jeune productrice n’a donc pas pu honorer toutes ses commandes.
De la plaine à l’alpage, « La Festuca »
Elia STAMPANONI, Auteur
Vincenzo Bortolotti était électromécanicien en Suisse. Il a commencé à élever trois vaches en 1973, durant une période de chômage. Il a alors décidé de continuer dans le secteur agricole et a acquis de l’expérience en alpage, tout en suivant une formation de fromager. Il a augmenté son nombre d’animaux en élevant ses propres veaux. Sa ferme a été certifiée bio dès 1986. Vincenzo Bortolotti a toujours transformé le lait à la ferme, à la fois par passion et par nécessité puisqu’il n’existait pas de filière lait bio (le lait serait sinon parti en conventionnel). Au départ, ses enfants avaient d’autres intérêts que l’agriculture mais, à partir de 2009, ils ont commencé à s’investir dans la ferme et ils sont actuellement à la tête de l’exploitation. Outre les alpages, la ferme dispose maintenant de 40 ha, dont 4,5 ha de châtaigneraies et une culture de kakis. La vente de fromages, de caissettes de viande et de fruits se fait en direct ou par le biais d’une coopérative (ConProbio). En 2020, avec le confinement, la demande en produits locaux a explosé, à tel point que les stocks en fromages de la ferme étaient déjà épuisés au printemps.
Procédés de transformation mis sur le banc d’essai bio
René SCHULTE, Auteur
De nombreux procédés de transformation industriels utilisés pour des aliments conventionnels ne sont pas autorisés en bio. En Suisse, le cahier des charges de Bio Suisse exclut, entre autres, les transformations chimiques, les irradiations, les traitements par micro-ondes, les ajouts d’arômes artificiels… La transformation des produits bio doit ménager le produit pour que ce dernier reste authentique (c’est d’ailleurs l’une des attentes des consommateurs de produits bio). La réglementation en la matière, au niveau de l’Union européenne, va se renforcer. Comme la réglementation suisse va dans le même sens que celle de l’UE, ceci va aussi entraîner un renforcement au niveau de ce pays. Jusqu’à présent, en Suisse, il n’y avait pas de prescriptions contraignantes, ni de critères homogènes pour évaluer la compatibilité d’un procédé de transformation avec la bio. Pour évaluer cette biocompatibilité, un panel de scientifiques issus de huit pays européens ont travaillé, entre 2017 et 2021, sur l’élaboration d’un guide permettant d’évaluer les technologies et procédés de transformation (projet ProOrg). Le processus d’évaluation utilisé repose sur trois étapes. Ces dernières sont détaillées dans cet article.