Le jojoba : une plante au secours des baleines (1994)
- Auteurs :
- François COUPLAN
- Type de document :
- Article
- Article en page(s) :
- p. 53-54 (2)
- Langues:
- Français
- Plan de Classement :
- PV PAM (Production Végétale Plantes Aromatiques et Médicinales)
- Résumé :
- Ce sont les Espagnols qui, au seizième siècle, ont nommé cet arbuste "jojoba", d'après le nom apache "hohowi". L'histoire du nom botanique du jojoba ne manque pas d'intérêt. Au début du XIXème siècle, au jardin botanique de Berlin, un paquet de plantes rassemblées en Basse-Californie fut confondu avec un autre ramassé en Chine. Le directeur du jardin, Johann Link appela donc le jojoba : "Buxus chinensis", le classant, ce qui est justifié, dans la même famille que le buis. Malgré l'erreur géographique, il fut décidé en 1912 que le nom officiel du jojoba serait Simmondsia chinensis Le jojoba est un humble arbuste du désert. Mais il pourrait permettre d'éviter l'extinction irrémédiable des baleines abusivement pourchassées depuis trois siècles. A condition que l'homme y mette du sien... Le jojoba aime pousser aux contreforts des montagnes du Mexique, là où le relief permet une pluviosité légèrement supérieure à celle de la plaine. Il a la forme d'arbustes d'un à deux mètres de hauteur, au feuillage dense, d'un vert grisâtre rappelant celui de l'olivier; ses feuilles sont larges et épaisses ; ses fruits sont brunâtres, ressemblant à des glands. Chacun de ces fruits contient une grosse graine brun foncé, blanche à l'intérieur : la graine qui sauve les baleines ! Les Indiens utilisaient la plante à des fins utilitaires, alimentaires et médicinales. Au début du XXème siècle, des scientifiques américains remarquèrent que l'huile extraite de ses graines était en fait une cire liquide douée de propriétés exceptionnelles. Il fallut pourtant attendre jusqu'en 1960 pour que l'on prenne réellement conscience du potentiel du jojoba. Il faut dire que l'on utilisait depuis le dix-huitième siècle un produit semblable à l'huile de jojoba : le "blanc de baleine" ou "spermaceti", extrait de la cavité cranienne du cachalot. Cette huile, vite devenue indispensable dans l'industrie des lubrifiants et des cosmétiques, était alors produite en quantité suffisante pour que personne ne songe à la remplacer. La chasse à la baleine était d'ailleurs une activité très lucrative pour les pays qui s'y adonnaient... Mais les cachalots disparaissent. En 1970, les Etats-Unis, face à ce danger d'extinction, lancèrent un programme de recherches et d'expérimentations pour trouver un substitut à l'huile de cachalot. Soixante produits végétaux ou animaux furent passés au banc d'essai : le jojoba en sortit vainqueur. L'huile de jojoba est très différente des autres huiles végétales connues, formées de triglycérides. Il s'agit en fait d'une cire liquide composée d'esters d'acides gras insaturés et d'esters d'alcools à longue chaîne. Elle possède une agréable saveur de noisette, ne rancit pas (insensible à l'oxydation) et peut se conserver 25 ans sans altération. Elle a des qualités de lubrification exceptionnelles On utilise avant tout l'huile de jojoba comme additif dans les lubrifiants. Les cosmétiques représentent également un débouché important : on l'emploie dans la lutte anti-vieillissement de la peau ; elle est aussi un très bon protecteur solaire ; elle revitalise les cheveux...A l'état hydrogéné, elle peut être utilisée pour la fabrication de cires lustrantes, en remplacement de la cire d'abeille. Le marché du jojoba est potentiellement très prometteur : on estime que les lubrifiants pourraient, à eux seuls, en utiliser un million trois cent mille tonnes par an, alors qu'on en produit guère actuellement que trente mille tonnes. De nombreux essais de cultures ont donc été entrepris dans les pays où le jojoba peut pousser : Californie, Israël, Australie, Soudan. Sa culture se montrerait particulièrement intéressante dans les pays en voie de développement au climat sec car le jojoba pousse dans les lieux arides et permet de combattre la désertification. Son extraction et son traitement relativement simples, la nécessité d'une main-d'oeuvre nombreuse pour la récolte, seraient un atout pour sa culture dans le tiers-monde. Non content de sauver les cachalots et les tortues, le jojoba pourrait aussi aider les hommes à vivre mieux. Souhaitons que cette modeste plante des déserts obtienne rapidement la place qu'elle mérite !
- Commande possible de photocopies :
- Oui
- Appartenance :
- ABioDoc